Située
à
une quinzaine de kilomètres à l’est d’Arles et à
proximité des étangs de Camargue, Saint Gilles du Gard
fut une cité portuaire dès l’Antiquité. Un monastère y
fut fondé au VIIIème
siècle où vint se retirer un moine ermite, Saint Gilles,
vénéré pour les miracles qu’il accomplissait.
Devenue
le
quatrième lieu de pèlerinage au Moyen Âge, derrière
Jérusalem, Rome et Saint-Jacques de Compostelle, la cité
était un haut lieu de rendez-vous des pèlerins qui se
rendaient en Terre Sainte ou à Rome et venaient adorer
les reliques de Saint Gilles. La cité prospérait
économiquement, notamment grâce à son port de commerce,
et il devenait nécessaire de la doter d’une église plus
vaste et plus majestueuse que les deux églises d’alors.
C’est au début du XIIème
siècle que fut entreprise la construction de l’église
dont nous voyons aujourd’hui ce qu’il en reste.
Bien
que
classée au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1998 au
titre des chemines de Saint-Jacques de Compostelle en
France, l’abbatiale reste méconnue proportionnellement à
l’abondante littérature qui lui est consacrée et aux
nombreux programmes de recherches dont elle fait encore
l’objet.
L’église
projetée
au XIIème
siècle comprenait une vaste crypte, appelée aussi église
basse, presqu’aussi grande que la nef de l’église
supérieure, une nef de six travées bordée de deux
collatéraux, un transept non-saillant et un vaste chœur
à déambulatoire avec cinq chapelles rayonnantes, un
imposant clocher et une majestueuse façade occidentale
richement sculptée. De cet imposant édifice roman, qui
vécut bien des malheurs tout au long de son existence,
il ne reste que la façade, la crypte, les parties
inférieures jusqu’à la naissance des arcades de l’église
haute, les ruines des soubassements du chœur et les
restes d’une tour, à l’extrémité nord de l’abside, qui
abritait un escalier hélicoïdal menant à des tribunes,
la célèbre vis de Saint-Gilles.
Histoire
de
la construction
L’édification
de
l’abbatiale Saint Gilles commence en 1116 par les
fondations et l’aménagement de la crypte, ou le
réaménagement de vestiges souterrains plus anciens
pouvant remonter au début du XIème
siècle.
La
façade
aurait été construite de 1120 à 1160, la crypte jusqu’en
1140 et même au-delà à cause de multiples réaménagements
au fur et à mesure de la construction de la nef bâtie de
1150 à 1175. Le chœur aurait été achevé au début du XIIIème
siècle vers 1210. Le clocher commencé en 1157 ne fut
achevé qu’au début du XIVème
siècle.
Les
ruines
du chœur que l’on voit aujourd’hui donnent une idée de
ce que devait être l’abbatiale du XIIème
siècle. Un tel étalement de la construction, presque un
siècle, résulte d’une part de l’extrême ambition du
programme et d’autre part des nombreuses interruptions
dues aux conflits entre les bénédictins qui avaient
autorité sur l’abbatiale rattachée à Cluny en 1077 et
les moines de l’abbaye.
Histoire
de
la destruction
Après
cette
longue gestation l’abbatiale fut dévastée par les
Huguenots en 1562. L’abbatiale est incendiée et les
voûtes de la nef s’effondrent, le clocher découronné, la
bibliothèque et les archives détruites et bien d’autres
mutilations sont infligées aux bâtiments monastiques. Une
partie
des reliques sont sauvegardée dans la basilique
Saint-Sernin de Toulouse. En 1622
le
duc de Rochan,
alors chef des protestants, ordonne la destruction
totale de l’abbaye. La partie haute de la façade
disparaît, la façade est ébranlée par des explosions, le
clocher est abattu et le chœur ruiné. Fort heureusement
les troupes protestantes quittent l’abbaye après la
victoire de Louis XIII sur les huguenots à Montpellier.
Les
restaurations
de l’abbatiale
D’importants
travaux
de restauration, entrepris entre 1660 et 1655,
transformèrent radicalement l’édifice. Seules les six
premières travées de la nef furent conservées jusqu’au
niveau des grandes arcades. On reconstruisit les grandes
arcades des cinq premières travées que l’on couvrit de
voûtes en ogive, on aménagea un chœur pentagonal dans la
sixième travée, entouré de deux espaces couverts
d’ogives. L’ensemble est fortement rabaissé : la nef
passe de 26 mètres de haut à 15 mètres et les
collatéraux de 16 mètres à 10 mètres. Le chœur fut
peut-être restauré, mais nous n’en avons aucune trace
parce qu’il fut détruit à la Révolution. Il n’en reste
que les soubassements qui ont été dégagés au XIXème
siècle. Le pignon de la façade est reconstruit mais
mesure 10 mètres de moins que l’original. Le clocher est
reconstruit.
Au
XIXème
siècle l’abbatiale est classée aux Monuments Historiques
et bénéficie d’une importante campagne de restauration
de 1842 à 1868. Les gravats qui recouvraient les ruines
du chœur sont enlevés, quelques maisons sont détruites
pour dégager la surface du chevet et la
perspective
vers la
façade occidentale. Les deux entrées latérales de la
façade sont débouchées et un large escalier est aménagé
devant le parvis en remplacement d’un perron centrale
semicirculaire qui avait été aménagé au XVIIème
siècle.
En
2016
eut lieu le retour des reliques sauvegardées à Toulouse
au XVIème
siècle et en 2017
la
façade a fait l’objet d’une importante campagne de
restauration des sculptures.
Compte-tenu
de
son implantation au centre de l’ancienne ville,
totalement entourée de petites maisons presque collées
contre les murs restants et malgré les quelques
dégagements opérés au XIXème
siècle, aucune vue d’ensemble n’est accessible au
visiteur, excepté la courte perspective offerte par la
petite esplanade devant la façade de l’église.
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