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C’est
le
long de l’arête, qui
est la
ligne d’intersection des cylindres, que les poussées
latérales exercées par chacune des portions de voûtes
demi-cylindriques vont se concentrer, se combiner et
être progressivement déviées vers la naissance de la
voûte.
Équilibre
de la voûte d’arête
Sur
les
deux schémas ci-dessous nous avons figuré en bleu et en
noir deux tranches de voûtes A et B qui se contrebutent
à leur point de jonction sur l’arête.
Les
portions
d’ arc A et B exercent les poussées a et b qui sont
inclinées dans l’espace, c’est-à-dire ni horizontales ni
verticales. La résultante de ces poussées est la force
r.
Les
poussées latérales sont approximativement
de
même
valeur et perpendiculaire
aux
deux
axes de la voûte d’arête.
La
résultante, en rouge, se situe dans le plan vertical où
se situe l’arête,
par
raison de symétrie.
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Vue
en perspective
Vue de
dessus
La
résultante
de toutes ces forces le long de l’arête se transmettra
de proche en proche en augmentant d’intensité jusqu’au
point d’appui, mur ou colonne, sur lequel repose la
voûte avec deux composantes : le poids qui s’exerce
verticalement et la poussée latérale horizontale.
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Vue
en coupe
Vue de
dessus
Lorsque
deux
travées sont adjacentes
les
effets des composantes longitudinales des poussées
latérales s’annulent et la
force résultante est perpendiculaire au
mur.
Elle sera contrebutée par
l’épaisseur
du mur renforcée par un contrefort et éventuellement par
une colonne engagée. La première travée est contrebutée
par le bloc occidental de la façade, la dernière travée
est contrebutée par le transept ou l’abside.
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Il
apparaît
ainsi clairement que les arêtes sont les points
névralgiques
de la
voûte
où
les forces se concentrent et s’opposent. Du
point
de vue de la résistance des matériaux
cette
zone est très fortement sollicitée, elle doit être
suffisamment robuste
pour
résister aux pressions
et avoir une géométrie parfaite
pour canaliser les
forces
jusqu’aux structures de soutien
sans les dévier. La réalisation de ces parties doit être
parfaite pour
assurer
la
bonne
stabilité
de
la voûte.
Construction
de la voûte d’arête
Le
schéma
de gauche montrent
la position du plan vertical passant par la courbe verte
pour obtenir la coupe de la voûte le long de l’arête. Le
schéma
de
droite
montre
le
plan
vertical et le dessin de l’arête dont la forme
géométrique est
une
demi ellipse.
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Le
coffrage en bois qui
soutient
la voûte durant sa construction doit rigoureusement
avoir la forme de la voûte
et
notamment sur l’arête qui en est la zone la plus
sensible. La
difficulté
provient de la construction de l’étaiement de l’arête
qui a la forme d’une demi-ellipse et non pas d’un
demi-cercle.
Autant
un
cintre
en forme de demi-cercle est facile à tracer avec un clou
et un simple cordeau faisant office de compas, autant il
est impossible de tracer un cintre en forme d’ellipse
avec un simple compas.
Il
est
fort peu probable que les architectes médiévaux savaient
que l’arête avait la forme d’une ellipse et si
par hasard ils connaissaient
la méthode du jardinier pour
tracer
un oval ils étaient vraisemblablement incapables de
déterminer la position des foyers
permettant
de respecter la hauteur et l portée de la voûte.
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Méthode
du
jardinier : une corde reliée à deux pieux, un bâton ou un crayon
qui tend la corde et déplacé en gardant la corde tendue
La
reconstitution
d’un coffrage d’une petite voûte d’arête exposé dans les
ruines de l’église abbatiale Saint Pierre à Maillezais
(85) montre l’approximation avec laquelle devait être
réalisée la forme de la voûte. En effet le cintre
supportant l’arrête, souligné ici en rouge, a été
réalisé avec les outils modernes de traçage et de
découpe. Imaginez ce que ce devait être avec les
techniques et les outils médiévaux.
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La
voûte
en blocage n’est pas trop difficile à réaliser puisqu’il
suffit de disposer les pierres vaguement dégrossies à
peu près correctement orientées dans un bain de mortier
épais répandu sur le coffrage en bois, à condition que
celui-ci respecte au mieux les formes et la symétrie.
La
voûte appareillée est plus résistante parce que d’une
part le matériau et bien plus homogène, et d’autre part
la transmission des forces le long de l’arête est mieux
orientée, à condition que la géométrie soit parfaitement
respectée, ce qui demande une excellente maîtrise de la
stéréotomie, du tracé des gabarits et de la taille de la
pierre car
tous les voussoirs arêtiers sont différents les uns
des autres.
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Cunault
(49)
Détail
des
voussoirs arêtiers
Ces
points
faibles et ces exigences dans
la construction des voûtes d’arête expliquent que ce
type de couvrement n’a été utilisé que pour des portées
modestes et donc ne permettait pas de satisfaire le
besoin de construire toujours plus haut, toujours plus
grand et toujours plus lumineux.
Ces
faiblesses
sont à
l’origine de l’invention de l’ogive,
les
ingénieurs de l’époque ne s’avouant jamais vaincus.
A
partir du XVIIème
siècle
la voûte d’arête fut parfois reprise grâce aux progrès
de la stéréotomie, des outils et des techniques
d’étaiement.
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