Techniques de construction de la voûte d'arête

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Définition technique

Équilibre de la voûte d'arête

Construction de la voûte d'arête



Définition technique


La voûte en arêtes est l’intersection de deux demi-cylindres de mêmes diamètres. Sur les schémas ci-dessous les deux arêtes et les limites de la voûte sont soulignées en vert.


    
    

C’est le long de l’arête, qui est la ligne d’intersection des cylindres, que les poussées latérales exercées par chacune des portions de voûtes demi-cylindriques vont se concentrer, se combiner et être progressivement déviées vers la naissance de la voûte.


Équilibre de la voûte d’arête


Sur les deux schémas ci-dessous nous avons figuré en bleu et en noir deux tranches de voûtes A et B qui se contrebutent à leur point de jonction sur l’arête.

Les portions d’ arc A et B exercent les poussées a et b qui sont inclinées dans l’espace, c’est-à-dire ni horizontales ni verticales. La résultante de ces poussées est la force r.

Les poussées latérales sont approximativement de même valeur et perpendiculaire aux deux axes de la voûte d’arête. La résultante, en rouge, se situe dans le plan vertical où se situe l’arête, par raison de symétrie.



Vue en perspective                                                                                   Vue de dessus

 

La résultante de toutes ces forces le long de l’arête se transmettra de proche en proche en augmentant d’intensité jusqu’au point d’appui, mur ou colonne, sur lequel repose la voûte avec deux composantes : le poids qui s’exerce verticalement et la poussée latérale horizontale.



Vue en coupe                                                                                                      Vue de dessus



Lorsque deux travées sont adjacentes les effets des composantes longitudinales des poussées latérales s’annulent et la force résultante est perpendiculaire au mur. Elle sera contrebutée par l’épaisseur du mur renforcée par un contrefort et éventuellement par une colonne engagée. La première travée est contrebutée par le bloc occidental de la façade, la dernière travée est contrebutée par le transept ou l’abside.





Il apparaît ainsi clairement que les arêtes sont les points névralgiques de la voûte où les forces se concentrent et s’opposent. Du point de vue de la résistance des matériaux cette zone est très fortement sollicitée, elle doit être suffisamment robuste pour résister aux pressions et avoir une géométrie parfaite pour canaliser les forces jusqu’aux structures de soutien sans les dévier. La réalisation de ces parties doit être parfaite pour assurer la bonne stabilité de la voûte.


Construction de la voûte d’arête


Le schéma de gauche montrent la position du plan vertical passant par la courbe verte pour obtenir la coupe de la voûte le long de l’arête. Le schéma de droite montre le plan vertical et le dessin de l’arête dont la forme géométrique est une demi ellipse.




Le coffrage en bois qui soutient la voûte durant sa construction doit rigoureusement avoir la forme de la voûte et notamment sur l’arête qui en est la zone la plus sensible. La difficulté provient de la construction de l’étaiement de l’arête qui a la forme d’une demi-ellipse et non pas d’un demi-cercle.

Autant un cintre en forme de demi-cercle est facile à tracer avec un clou et un simple cordeau faisant office de compas, autant il est impossible de tracer un cintre en forme d’ellipse avec un simple compas. Il est fort peu probable que les architectes médiévaux savaient que l’arête avait la forme d’une ellipse et si par hasard ils connaissaient la méthode du jardinier pour tracer un oval ils étaient vraisemblablement incapables de déterminer la position des foyers permettant de respecter la hauteur et l portée de la voûte. 



Méthode du jardinier : une corde reliée à deux pieux, un bâton ou un crayon qui tend la corde et déplacé en gardant la corde tendue



La reconstitution d’un coffrage d’une petite voûte d’arête exposé dans les ruines de l’église abbatiale Saint Pierre à Maillezais (85) montre l’approximation avec laquelle devait être réalisée la forme de la voûte. En effet le cintre supportant l’arrête, souligné ici en rouge, a été réalisé avec les outils modernes de traçage et de découpe. Imaginez ce que ce devait être avec les techniques et les outils médiévaux.


    

La voûte en blocage n’est pas trop difficile à réaliser puisqu’il suffit de disposer les pierres vaguement dégrossies à peu près correctement orientées dans un bain de mortier épais répandu sur le coffrage en bois, à condition que celui-ci respecte au mieux les formes et la symétrie.

La voûte appareillée est plus résistante parce que d’une part le matériau et bien plus homogène, et d’autre part la transmission des forces le long de l’arête est mieux orientée, à condition que la géométrie soit parfaitement respectée, ce qui demande une excellente maîtrise de la stéréotomie, du tracé des gabarits et de la taille de la pierre car tous les voussoirs arêtiers sont différents les uns des autres.      


    

Cunault (49)                                                                            Détail des voussoirs arêtiers



Ces points faibles et ces exigences dans la construction des voûtes d’arête expliquent que ce type de couvrement n’a été utilisé que pour des portées modestes et donc ne permettait pas de satisfaire le besoin de construire toujours plus haut, toujours plus grand et toujours plus lumineux.

Ces faiblesses sont à l’origine de l’invention de l’ogive, les ingénieurs de l’époque ne s’avouant jamais vaincus.

A partir du XVIIème siècle la voûte d’arête fut parfois reprise grâce aux progrès de la stéréotomie, des outils et des techniques d’étaiement.